L’Afroprisme à l’Iboat: l’événement vu par le prisme des organisateurs

Un nouveau concept va faire ses premiers pas à l’Iboat Samedi 23 février, dernier Week End du Black History month : la journée Prisme. Pour sa première édition la couleur est donnée, les nuances claires-obscures des cultures afro. Un événement qui garantit une expérience saisissante en immersion dans une culture souvent trop peu (mal) connue.   

AFROPRISME, un nom original pour une soirée qui l’est tout autant. Le concept : mettre en avant la culture afro et tout ce qu’elle implique. Il ne s’agira pas de présenter, comme dans un musée, des vitrines « exotiques » qui satisferaient les représentations que chacun a de cette culture. Sera plutôt proposée une véritable immersion, sincère, un moment de partage avec des personnes qui appartiennent à la culture afro, leurs quotidiens, leurs difficultés et leurs réussites. Un thème d’actualité de fond. Les intervenants offriront chacun une facette de ce prisme aux multiples couleurs qui cache un centre nébuleux bien moins connu. A l’occasion de cette journée diverses activités prendront place à bord du bateau culturel bordelais en réinvestissant le lieu pour l’amarrer vers un nouvel horizon. Expositions photographiques, spécialités culinaires, œuvres artistiques de nature diverses, récit du projet ATLAS (description du projet dans l’interview), Djset, … (liste non exhaustive). Difficile de s’ennuyer avec une programmation si riche et éclectique. Mais surtout des discussions, des moments d’échanges avec les participants, car tout réside en cela : confronter des prismes, soulever des questions, découvrir de nouvelles réalités. Tout cela en entrée libre. Une prise de conscience lumineuse qui n’a pas de prix.

AFROPRISME

A J-7 de l’Afroprisme nous avons rencontré les organisateurs de cette soirée (AngeLique et EyMeric fondateurs de la société ALEM) pour nous confronter à leur prisme, leurs idéaux et leur ressenti. Un duo complémentaire à la vision commune qui a pris le temps de nous présenter leur(s) projet(s). La société ALEM, agence de conseil en communication, contenu médiatique et évènementiel a la particularité en plus des commandes clients, de travailler sur différents projets de leur initiative. La soirée PRISME est l’un d’entre eux. Nous voulions connaître la genèse de cet événement et les valeurs qu’il porte dans les esprits des concepteurs.

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Eymeric, Malal et Angélique. Guédiawaye, dans la banlieue de la capitale Sénégalaise

« Faire de votre trésor personnel une richesse collective ». Une phrase qui se retrouve dans tous vos communiqués, pourriez-vous m’expliquer cet emblème ?

Eymeric : c’est le slogan de l’entreprise qui chapeaute bien ce que l’on ambitionne de faire de manière commerciale via nos clients et le côté fondation où c’est vraiment ce que l’on veut faire de manière social. Je prône le fait qu’on puisse travailler en communication de manière éthique.

Angélique : Un des points communs que l’on a, c’est ce côté éthique, social, partage que chacun donne aux expériences professionnelles et personnelles. A un moment on ne l’a pas retrouvé dans ce que l’on faisait. C’est ce qui nous a motivé à vouloir faire quelque chose qui nous ressemble et c’est comme ça qu’Alem est né.

La soirée de la semaine prochaine est annoncée comme la « première », supposant d’autres soirées PRISME. Avez-vous déjà pensé à la suite, aux thèmes que vous aimeriez aborder ?

E : Les soirées PRISME au minimum ce sera biannuel. Il y en aura une autre en 2019. On a déjà des idées, c’est peut-être trop tôt pour en parler, mais on n’est pas à l’abris que ce soit un Afro 2. Toutes les portes restent ouvertes. On ne veut pas non plus être réduit uniquement à cela, même si ça ne nous gène pas vraiment. Ce sera en tout cas à chaque fois des soirées qui nous ressemblent. Après on reste ouvert aux suggestions, les boîtes à idées etc. On avait pensé aussi à un prisme féminisme, pourquoi pas.

: ça dépendra aussi de l’actualité au moment de la deuxième soirée, savoir si ça fait sens ou pas dans notre stratégie de communication.

Un concept déclinable sur plusieurs thèmes. Justement vous parlez de « mettre en lumière un thème d’actualité et ses enjeux ». Pour la soirée Afroprisme, pouvez vous me parler un peu plus de l’actualité visée.

E : Si quelqu’un me demande lors de l’événement « quel est le thème d’actualité ? » je leur dirai de demander aux intervenants. De demander si pour eux ce n’est pas d’actualité de trouver un appartement difficilement, de présenter son projet, d’être un artiste noir, …Tous les côtés positifs aussi, Black Panther c’est 2017.  C’est en 2017 que des gens ont pu affirmer qu’il y a un super héros noir. C’est toute cette actu là aussi.

: Malheureusement c’est un thème d’actualité. Qui est de plus en plus fort et de plus en plus présent dans la société. Le thème de dire « Je suis noir dans cette société ». Je pense que sur les dernières années il y a eu un changement et un brassage de ce thème, de dire « je suis noir ». Sur tous les points : physiques, psychologiques, sociétaux.

E : ça a commencé par des questions de la part de notre gouvernement sur qu’est ce que c’est être français. Forcément il y a des gens qui ont dû se poser la question qu’est ce que c’est d’être noir ensuite. Par exemple j’étais au téléphone avec Lassana Traoré, le frère du défunt Adama Traoré, et quand je lui ai expliqué l’évènement il m’a demandé s’il allait trouver sa place au vu du discours etc parce qu’il trouvait que ça avait l’air d’une journée positive. Je lui ai dit que la journée c’est aussi ça, le quotidien de la diaspora afro qui est d’actualité. C’est pareil pour le féminisme, ou le bio, enfin tout ça c’est d’actualité.

L’événement se passe pendant le Black History Month, est ce que c’était important pour vous qu’il s’inscrive pendant cette période ?

: c’était planifié. On voulait que ce soit pendant le Black History Month et aussi parce que c’était l’anniversaire de mon père. Tant par ma couleur que par le reste c’est mon père qui est moteur derrière. C’était important que ce soit cette date.

La soirée est sous le signe de l’éclectisme culturel et artistique, avec une une richesse remarquable dans la programmation. La question était de savoir comment vous avez choisi les intervenants et quel était le critère pour avoir la possibilité d’afficher son prisme à la soirée ?

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Oeuvre de Through Your Body, artiste présente à l’évènement

: Je le dis en tant que blanc, moi ça me tenait à cœur, et ce n’est pas caché, que le jour de l’événement tous les gens qui leaderont l’évènement soient des personnes noires. Après le public sera d’horizons différents, ils seront invités à prendre la parole etc. Il a un petit interstice entre la discrimination positive et le fait de mettre en exergue. Il est important qu’il y ait des journées qui valorisent cela. S’il y a un prisme LGBTQ, je ne vais pas mettre des hétéros qui vont commencer à parler. C’est une question de laisser la place à certaines personnes.

J’imagine que ce n’était pas le seul critère, qu’est ce que vous recherchiez à part cette appartenance à une culture ?

: Des gens qui ont une histoire et qui la transmettent. Il y aura des peintres, chanteurs, danseurs, activistes, entrepreneurs qui portent des projets importants. Je voudrais aussi remercier la mobilisation des intervenants qui ont compris le concept de la journée et pourquoi on le faisait. On nous a aussi contacté pour participer.

: Il y a des gens, les principaux concernés, qui étaient surpris qu’il y ait un événement comme ça. Une Dj parisienne nous a dit que même à Paris il n’y en avait pas. C’est là où le débat va être intéressant le jour J : il y aura des gens qui vont se dire que ça fait du bien, et il y aura peut-être des gens qui vont se demander pourquoi il n’y a que des personnes noires. On en profitera pour discuter ce jour là, il y aura de l’émulation et de la synergie.

A : Les intervenants ont des points de vus très différents, dans la même culture ils s’opposent, et ce de manière positive. On parle de la culture, de la diaspora dans tout ce qu’elle représente, c’est à dire qu’est ce que ça veut dire être une femme noire et avoir ouvert son cabinet d’avocat et d’avoir réussi par exemple.

E : Nous on n’attend rien du tout, c’est simplement une invitation. On n’avait pas à dire il rentre dans notre définition de la culture afro ou pas. On voulait partir de quelque chose qui leur est inhérent : appartenir à telle diaspora. Et après ils peuvent avoir des idées avec lesquelles nous ne sommes pas d’accord, justement c’est l’occasion d’en discuter, la journée est faite pour ça. Tant que cela reste dans le respect de tous.

On aura le droit au récit du projet ATLAS, est ce que vous pouvez me le présenter et me parler de ses origines ?

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« Accra 🇬🇭, nous avons eu la chance de rencontrer la branche ghanéenne d’UJPOD, l’ONG togolaise que nous avions rencontré quelques jours auparavant » légende ALEM

: A la base on partait voir une amie qui est en service civique et tout s’est découlé de là. Et puis des propositions sont venues à nous, on ajoutait les pays à notre périple au fur et à mesure. Un contact au Togo, au Sénégal, etc.

E : On voulait faire un état des lieux de ce qu’il se passe, on était à mille lieux de savoir ce qui nous attendait. C’est une idée qu’on avait déjà en tête depuis longtemps, c’est juste que le futur est venu à nous plus vite que prévu et on l’a adapté. Les choses se sont mises en place. En terme de ressenti on n’imaginait pas tout ce qui allait nous arriver. Avant de partir l’idée était quand même très clair, on a lancé une campagne de financement, les gens savaient ce qu’on allait faire là bas. IL y avait le suivi via les réseaux sociaux. Il y a eu deux étapes dans la conception du projet.

Par rapport à vos attentes et vos frustrations, quel est votre ressenti depuis votre retour ?

: Excédées. C’était le voyage de ma vie dans le sens où il y a ce que je pensais avant, ce qui s’est passé et ce que je pense maintenant. On continue à décanter jours après jours et ce conflit intérieur aussi dans tout ce que tu as vu. Sur notre chaine Youtube (vidéo ci-dessus : ndlr) vous pouvez voir toutes les personnes que l’on a rencontré et ce que l’on a vécu.

: Tout est exacerbé, dans le négatif et dans le positif tout a dépassé les attentes. Il y a besoin de recul sur certaines choses. On a rencontré des personnes très importantes, qui te font vivre des choses très intenses, tout est TRES. On a laissé une part de notre naïveté. Atlas il y en aura forcément un autre. On s’est vraiment rendu compte qu’il y avait des gens qui méritent et qu’il fallait pousser.

C’est ce que vous faites en quelque sorte avec l’événement, si j’ai bien compris il y a des personnes que vous avez rencontré qui viendront pour l’évènement ?

E : Du Sénégal, du Togo et de Cote d’Ivoire.

A : Le projet ATLAS ce n’est pas que nous deux, mais toutes les personnes que nous avons rencontré et qui se sont ouvertes à nous. C’est elles qui font le projet Atlas à notre place. On veut que les gens repartent avec des questions, avec les yeux plus ouverts qu’ils ne l’ont maintenant.

: Je souhaite bien sûr qu’il y ait le plus de gens possible, mais ma première victoire sera ce que les intervenants vont nous dire à la fin de la journée. C’est ce qui va beaucoup compter pour moi, si le public est content c’est parce que les intervenants seront heureux aussi. Mon souhait est que sur une journée comme ça ils se sentent mis en exergue. Et les relations entre les intervenants aussi vont être intéressantes. C’est le slogan d’ALEM « faire de votre trésor personnel, une richesse collective ». Nous on reste en retrait, on ne veut pas faire de l’ombre au reste de l’événement.

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Oeuvre Shaz Art, artiste présent à l’évènement

A J-7 de votre premier événement qui incarne des valeurs qui vous tiennent tous les deux à cœur, quelles sont vos craintes ? vos attentes ?

A : Je suis d’une nature assez stressée, et là étonnement je ne le suis pas, il doit y avoir un bon pressentiment. On a rencontré tous les intervenants, et c’est quand même rassurant. Eux ils parlent de choses qu’ils vivent tous les jours et ils sont heureux de montrer ce qu’ils font.

E : ça arrivera le jour J, il y aura un moment de stress. Mais la journée ce n’est pas nous, ce sont les intervenants, nous ça reste de la logistique.

Quelque chose à rajouter ?

: C’est important de dire que c’est gratuit et libre à tous. Les activités commenceront dès le début de la journée (14H : ndlr), que ce serait dommage de manquer certaines parties de l’événement. Je m’engage auprès des gens, une fois que vous êtes dans la boucle il n’y pas de moments où vous allez vous ennuyer et avoir envie de partir. Tout est construit pour qu’il y ait un enchainement et une continuité.

A : Il n’y a rien de cliché, tout a été fait de manière très sincère et avec le cœur.


 

Crédits photo et vidéos : ALEM.

Informations sur l’événement sur la page facebook ; https://www.facebook.com/events/385797485490698/

 

 

 

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